L’appétit d’une souris coupé par stimulation cérébrale

L’appétit d’une souris coupé par stimulation cérébrale

Imaginez pouvoir couper votre appétit pour éviter de grignoter ? Ou bien l’activer pour réguler des troubles alimentaires ? La science n’en est pas encore capable, mais elle vient de s’approcher d’une telle possibilité lorsque des scientifiques américains sont parvenus à couper l’appétit d’une souris, lui stoppant toute envie de manger, à l’aide d’une stimulation du cerveau.

Des neurones contrôleraient l’appétit

Cette découverte fut une surprise pour toute l’équipe, qui cherchait alors à provoquer chez une souris la sensation de peur et d’anxiété. Sauf que, lorsque son cerveau fut stimulé par un signal, le petit rongeur s’arrêta brusquement de manger, mais n’eut l’air nullement effrayé. « C’était une découverte accidentelle » a ainsi déclaré David Anderson du California Institute of Technology, le responsable de cette équipe qui s’intéressait à la partie du cerveau berceau des émotions : l’amygdale.

En voulant donc provoquer des émotions chez la souris, les chercheurs ont semble-t-il coupé l’appétit de cette dernière. Ils ont en effet réalisé plusieurs tests pour s’assurer que le rongeur n’avait pas été détourné de la nourriture, qu’il était en train d’avaler, par un sentiment de peur soudaine. Mais il s’est avéré que les neurones activés par le signal sont également sollicités par des saveurs/odeurs désagréables ou des malaises « viscéraux », soit deux phénomènes bien connus pour couper l’appétit.

Le groupe du Docteur Anderson conclut donc que « quelques neurones » (plusieurs milliers) agissaient sur l’appétit. Ces derniers joueraient un rôle inhibiteur : « Je pense que ces neurones de l’amygdale aident les animaux à éviter la nourriture toxique ou mauvaise » a ajouté le neuroscientifique Richard D. Palmiter de l’Université de Washington.

Une technologie très sophistiquée

l'optogenetique sur une souris de laboratoire

En reliant des câbles optiques au cerveau, l’optogénétique permet de stimuler des neurones

Pour envoyer un signal au cerveau du rongeur, les scientifiques ont utilisé la technique de l’optogénétique, qui vise donc à rendre des neurones sensibles à la lumière afin de les faire réagir. Relativement récente, cette méthode devrait permettre d’en apprendre plus sur les neurones, qui sont des acteurs encore très peu connus.

La mise en place du processus, qui demande des notions de génétique et d’optique (d’où le terme d’optogénétique) relie au cerveau des câbles optiques : lorsque ces derniers envoient un signal lumineux (dans le cas de cette expérience, une lumière bleue), des neurones peuvent être « activés » ou « désactivés ».

Une position surprenante du centre de contrôle de l’appétit

position de l'amygdale dans le cerveau humain

L’amygdale (en rouge) est le centre des émotions dans le cerveau.

Les conclusions de cette découverte sont encore à prendre avec des pincettes, mais le fait qu’elles indiquent que les neurones responsables de l’appétit se situent dans l’amygdale ne laisse pas indifférents les chercheurs. En effet, cela prouverait que l’appétit et les émotions sont liés : si chez les humains aussi, les neurones de l’appétit se trouvaient dans l’amygdale, cela expliquerait entre autres pourquoi certains mets apportent autant de plaisir et de satisfaction.

La question des humains, d’ailleurs, se pose : qu’elles pourraient être les retombées d’une telle découverte si l’on prouvait que les neurones de la souris se retrouvaient chez nous au même endroit, et avec le même « pouvoir » ? Cela permettrait principalement d’étudier, mieux comprendre et peut-être même guérir des troubles alimentaires.

Toutefois, Richard D. Palmiter rappelle que le cerveau peut agir sur l’appétit et la faim de nombreuses autres manières. Les neurones de l’amygdale n’en seraient donc qu’une parmi d’autres. Par ailleurs, l’optogénétique n’a pour l’instant que peu été expérimentée sur les humains : des premiers tests, concluants, ont été effectués sur des personnes souffrant de dépression. Quoi qu’il en soit, les chercheurs ont encore plusieurs années de travail pour parvenir à percer la clé de notre appétit, et encore bien plus pour comprendre comment fonctionne notre cerveau !

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